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mémoire de liseur
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8 juillet 2010

La "librairie" de Montaigne

Le texte qui suit, extrait du chapitre III du troisième livre des Essais de Montaigne, fait suite à l’extrait publié ici sous le titre Montaigne : Le commerce des livres

 

Chez moi, je me détourne un peu plus souvent à ma librairie, d’où tout d’une main je commande à mon ménage. Je suis sur l’entrée et vois sous moi mon jardin, ma basse-cour, ma cour, et dans la plupart des membres de ma maison. Là, je feuillette à cette heure un livre, à cette heure un autre, sans ordre et sans dessein, à pièces décousues ; tantôt je rêve, tantôt j’enregistre et dicte, en me promenant, mes songes que voici.

Elle est au troisième étage d’une tour. Le premier, c’est ma chapelle, le second une chambre et sa suite, où je me couche souvent pour être seul. Au-dessus, elle a une grande garde-robe. C’était au temps passé le lieu plus inutile de ma maison. Je passe là et la plupart des jours de ma vie, et la plupart des heures du jour. Je n’y suis jamais la nuit. A la suite est un cabinet assez poli, capable à recevoir du feu pour l’hiver, très plaisamment percé. Et, si je ne craignais non plus le soin que la dépense, le soin qui me chasse de toute besogne, je pourrais facilement coudre à chaque côté une galerie de cent pas de long et douze de large, à plain pied, ayant trouvé tous les murs montés, pour autre usage, à la hauteur qu’il me faut. Tout lieu retiré requiert un promenoir.  Mes pensées dorment si je les assieds. Mon esprit ne va si les jambes ne l’agitent. Ceux qui étudient sans livre en sont tous là.

La figure en est ronde et n’a de plat que ce qu’il faut à ma table et à  mon siège, et vient m’offrant en se courbant, d’une vue, tous mes livres, rangés à cinq degrés tout à l’environ. Elle a trois vues de riche et libre prospect, et seize pas de vide en diamètre.

 

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