Romain Gary : picaresque
Au début des années 60, dans Pour Sganarelle / Recherche d’un personnage et d’un roman, Romain Gary écrivait :
Notons enfin un autre facteur qui détermine le retrait devant le roman : le raffinement mallarméen des sensibilités ultra-littéraires ne supporte guère la chair, les testicules, le sang, la grossièreté, la vulgarité picaresque de la vie.
Disposons maintenant rapidement, avant de tenter enfin l’œuvre, de quelques-unes des méditations à la mode sur « l’impossibilité » du roman de notre temps.
« L’ébranlement des valeurs stables », ce confortable cliché pieusement invoqué est pure ineptie : le roman moderne est né de cet ébranlement, lorsque la chute des valeurs « stables » de la Chevalerie et des certitudes du Moyen Age a donné naissance au roman de l’impiété et de l’irrespect envers la Puissance à la fin du XVIIe espagnol. Tout le roman picaresque est sorti de ces fissures qui apparaissaient soudain dans l’Escurial de l’obscurantisme, de la remise en question de son Cérémonial, et de la Vérité intronisée.