Dickens vu par Théophile Gautier
Dans un article paru dans Le Moniteur universel du 23 Avril 1866, Théophile Gautier parle de Dickens.
Il oppose le « génie saxon au génie latin », aux auteurs « toujours préoccupés du plan, de la ligne, de la symétrie, de l’ordonnance et autres qualités régulières ».
« Les romans de Charles Dickens ressemblent à ces vieilles résidences anglaises dans le style usité sous la reine Elizabeth. Aucun plan ne parait avoir présidé à la construction de ces bizarres édifices dont les diverses parties semblent s’être juxtaposées au fur et à mesure de la fantaisie ou des besoins des propriétaires. Au-dehors on aperçoit des murs de briques irrégulièrement troués de croisées disparates : celles-ci grandes, celles-là petites, les unes à meneaux de pierre, les autres à mailles de plomb. Des tourelles crénelées, des cabinets en saillie, des serres vitrées, des terrasses rejoignant une tour à l’autre, s’appliquent aux murailles sans nul soin de la symétrie ; les cheminées, d’un ton rougeâtre, hérissent çà et là les angles des toits ; des portiques de pierre blanche abritent les portes placées comme au hasard.
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Le génie latin préfèrerait certainement la maison cubique à ce pittoresque amas de cahutes, mais l’esprit libre et fantasque de Dickens ne saurait s’encadrer dans une forme si géométriquement froide, et il s’en échappe par tous les côtés. »